VITRY-SUR-SEINE (AFP) - La cité Balzac de Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne), où Sohane est morte brûlée vive en 2002, était partagée samedi entre le sentiment des parents d´une condamnation "dure mais juste" et celui des plus jeunes "dégoûtés" par un verdict si "lourd".
Dans la nuit de vendredi à samedi, la cour d´assises du Val-de-Marne a condamné Jamal Derrar, 22 ans, à vingt-cinq ans de réclusion criminelle pour avoir brûlé vive Sohane Benziane en octobre 2002 dans un local à poubelles de la cité, et Tony Rocca à huit ans de prison ferme pour complicité.
"Les jeunes sont dégoûtés, 25 ans c´est trop", témoigne un copain de Jamal qui travaille à la boucherie Abdel. "Moi à son âge j´aurais pu faire la même chose pour faire flipper une meuf. La vérité c´est qu´il n´a pas fait exprès".
"Ce matin, une vieille m´a dit qu´il faudrait rétablir la peine de mort pour Jamal", ajoute ce copain qui préfère rester anonyme. A côté de lui, "El Hadj", un vieux monsieur de 85 ans, estime que Jamal devrait "passer le restant de ses jours en prison". Ce matin, visiblement énervé, il en a parlé avec un de ses fils, de 24 ans, pour qui Jamal aurait dû "prendre 4 ou 5 ans, pas plus".
Une mère de famille arrive avec sa fille adolescente, elle voudrait donner son avis mais n´ose pas. "On est dans une zone où l´on a pas le droit de parler parce qu´il y a trop de menaces". On comprend que pour elle la peine est juste, mais elle s´en tient à répéter: "il faut que je parte d´ici, ça fait 25 ans et je n´en peux plus".
Assis sur les marches devant un immeuble de la cité, deux jeunes sont plongés dans Le Parisien et l´article consacré au procès de Sohane mais ils ne veulent pas parler: "on sait rien, on sait rien".
Celui que tout le monde appelle Zidane, 40 ans, lui, sait. Il sait que "ce n´est pas Jamal qui a mis le feu". D´ailleurs "s´il s´est brûlé, c´est pas pour rien". Pour ce père de deux jeunes enfants qui a passé 5 ans en prison, "Jamal c´est un petit jeune, il est pas méchant. C´est une victime comme Sohane. Une victime de la vie à Balzac".
Son ami, Karim, 33 ans, a un avis encore plus tranché: "Nono", comme on surnomme Jamal, applaudi par des jeunes lors de la reconstitution des faits en mars 2003, est "un des types les plus gentils du quartier". Et s´il a été condamné, "c´est à cause des +ni putes ni soumises+ et de toutes les petites suceuses du quartier qui ont parlé à la place de Sohane".
De leur côté, la plupart des jeunes femmes préfèrent se taire. Avant de prendre son bus, une jeune musulmane lâche juste: "ici il y a des machos mais il n´y en a pas plus qu´ailleurs". Une autre jeune femme, la vingtaine, pense que "25 ans c´est trop lourd. Jamal n´a pas fait exprès".
Un père de six enfants, de 47 ans, applaudit la condamnation "dure mais juste". Il connaissait Sohane et il a une explication au drame: "Sohane n´avait pas de grand frère, c´est pour ça que Jamal s´est permis de faire ça."