Commentaires : Le crunch : retour sur un mal qui ronge l'industrie du jeu vidéo

Il y a aussi une sacrée pression mise par les joueurs pour que les jeux sortent le plus vite possible.
Il suffit d’aller faire un tour sur le forum de World of Warcraft. La nouvelle extension, pas prête, a été repoussée. On a l’impression que c’est la fin du monde et ça tire à boulets rouges dans tous les sens…

1 « J'aime »

cela existe depuis longtemps ! on en parle seulement depuis 4-5 ans ! les conditions sont de pires en pires ! Donc c’est qu’il faut rapidement définir un encadrement et légiférer et pourquoi pas un label sur le respect du droit humain

Vu le salaire et prime des développeurs on va pas pleurer, qu’ils change de métier s’ils sont mécontents.
Sinon le coupable numéro 1 sont les actionnaires et l’argent

Quel est leur salaire? Et les primes?

1 « J'aime »

Ca fait 25 ans que je suis dans le JV, bon, j’ai justement fait une pause pour aller dans d’autres secteurs en majeure partie a cause du crunch, mais je dois dire une chose: ce qui me flingue le plus dans l’histoire, c’est pas le nombre d’heures, c’est surtout le fait que pleins de studios (pas tous, mais quand meme) font un max d’argent avec leurs jeux et que les employes ont bosses double pour le meme prix!
Combien d’annees j’ai fait ca? J’aurais ete paye a l’heure je serais riche!
Deja si les employes pouvaient avoir une remuneration qui compense, ca serait deja ca. En aucun cas je ne justifie le crunch, mais je dois bien avouer une chose: quand tu vises l’excellence, tu n’ameliores pas les choses en rajoutant du monde, tu n’ameliores pas les choses en prenant plus de temps (la techno bouge trop vite), au bout du compte, le crunch est necessaire…
Apres dans pleins d’autres cas il y a du crunch juste pour faire des economies (et c’est d’ailleurs le cas majoritaire) et c’est vraiment ecoeurant…
Comment resoudre le pb, ca… je ne sais pas… je n’arrive personnellement pas a etre vraiment productif en bossant moins de 60hr par semaine, entre les meetings, les interactions, suivre les projets des autres, faire les code review, si apres il te reste 1hr pour coder tu patines dans la semoule… Au bout du compte il faut coder 6hr par jour minimum pour avancer et dans beaucoup de cas ca demande de bosser le double…

3 « J'aime »

Dans mon domaine (je précise que je ne suis pas dans le civil), il arrive souvent que l’on se retrouve dans l’urgence permanente (en caricaturant, si on a 5 minutes on mange, si on a 10 minutes on essaye de dormir) pendant plusieurs jours voir semaines. Mais pour se faire on est sensé être longuement préparé aussi bien physiquement que mentalement (et bien sûr on a un suivit médical). Mais là, j’ai l’impression que l’amateurisme est roi (du genre à prendre les carences alimentaires à la légère) ! Et le fait que cela devienne la norme est franchement inquiétant.

Sujet délicat, mais qui ne concerne de loin pas que le monde du jeu vidéo, mais globalement tous les corps de métier ou il y a une date de fin fixe et invariable.

Et encore, dans le JV, ils peuvent repousser la sortie, typiquement le cas pour Cyberpunk 2077 qui a été repoussé de 7 mois, mais en contrepartie, les joueurs / presse / critiques seront bien plus exigeant, si le jeu n’est pas nickel, ils vont se faire désosser, et ça sera très violent.

Car sortir à tout prix un jeu à la date de base, ça peut être catastrophique (Antem et Wolcen auraient largement mérité encore 6 mois de taf).

je suppose que pour les employeurs le crunch doit etre facile dans l’informatique, ou on aime bien les ptis jeunes pret a tout - la plupart des gens de mon age qui n’ont fait que de l’informatique on change de metier justement a cause de cela

Je ne travaille pas directement dans l’industrie du jeu vidéo, mais plusieurs de mes amis le sont (Ubisoft, EA, Gameloft, WB, etc.) et vivent ce qui est décrit ici. Évidemment, ce n’est pas réservé à cette industrie.

Cela fait des dizaines d’années que cela existe, mais on en parle ouvertement (au sens : dans les médias / réseaux sociaux) que depuis 5-6 ans peut-être. Et honnêtement, quand ils m’en parlent, il y a toujours une part de fierté/résilience (accomplissement) mélangée à un sentiment de mal-être (frustration). Des amis et connaissances avec des cernes importants pendant plusieurs semaines, j’en ai vu. Aucun jusqu’à une dépression profonde, mais plusieurs ont vécu des périodes de déprimes ou mini burn-out.

Se retrouver avec son équipe à travailler non-stop pendant plusieurs semaines pour « finir » un milestone majeur les épuise totalement. Et il ne faut pas croire que pendant les périodes non « crunch », ils se roulent les pouces.

Ce n’est pas un sujet tabou au sein de ces équipes opérationnelles. Mais le middle-management n’a aucun réel pouvoir pour changer cela. Donc rien ne change réellement.

Par la suite, on leur offre des vacances (car de toute façon, ils sont brûlés, le moral et le désengagement sont bas). Ce qui a un effet pervers, car de fait, d’autres retards s’accumulent (correctifs, nouvelles features, maintenance, etc.). De fait, même si ce ne sont pas les mêmes équipes qui poursuivent ces activités, les précédents membres sont indisponibles.

Leurs organisations sont parfaitement au courant de ces pratiques et cette réalité. Et sans changer cela, ils mettent en place des « avantages » pour faire passer la pilule : pleins de goodies pendant et après le lancement du jeu, des billets de loisir (cinéma, concert, etc.), des salles de détente et loisir, des massages, des repas gratuits, etc. Mais au final, cela ne change pas cette réalité. C’est comme donné des vitamines à un corps malade pour masquer ou alléger les symptômes.

Ce n’est pas pour rien qu’après souvent une lune de miel de 2-3 ans, de nombreux développeurs, testeurs, créatifs ou PM de ce milieu changent d’entreprise, voir de secteur d’activité, ou encore de créer leur propre mini-studios indies.

La population est relativement jeune (20-35 ans), donc plus consentante à se donner à 150% pour l’entreprise, pour son équipe et ses collègues (surtout). Le salaire est très correct mais pas exceptionnel, et les avantages sont par contre nombreux. Mais quand on fait le bilan, je ne doute pas que beaucoup se rendent compte que cela n’en vaut pas la chandelle.

Derrière cela, il peut il y avoir du management « toxique » (le stress, les autocrates, etc.) ou simplement peu collaboratif. Je me rappelle d’une soirée avec des amis où 2 d’entre eux se sont rendus compte qu’ils travaillaient pour Ubisoft Montréal, sur le même jeu, dans le même étage, à 1 dock de séparation, et ne le savait même pas depuis 1 an.

Alors oui, les employés regardent souvent comment cela se passe chez les concurrents, et cette communauté partage fréquemment leur réalité sur le web (Reddit principalement). L’herbe n’est pas plus verte ailleurs, et le fait que ce soit un management globalement généralisé ne fédère pas. Ce n’est pas parce que c’est la norme que cela doit être considéré comme « normal ».

4 « J'aime »

Je peux comprendre ce raisonnement (même si en désaccord personnellement). Je préfère cependant de mon côté séparer ces 2 choses :

  1. la rémunération
  2. le respect aux personnes (qualité d’environnement de travail)

C’est pourquoi, je n’ai aucun problème à soutenir les revendications de techniciens Amazon (dans les entrepots), du personnel terrain Uber, ou encore celui de développeurs dans l’industrie du jeu vidéo.

1 « J'aime »

Après 30 ans passé dans le monde du travail salarié, je sais que le « crunch » n’est pas un phénomène nouveau ni réservé aux industries du jeux.

Toutefois en 30 ans j’ai vu muter en profondeur le monde de l’entreprise qui le rend très favorable au développement de cette pratique.
L’individualisation, la culture de la performance, l’uberisation, la quasi disparition du concept d’heure de travail trop has been (ben voyons) et aussi le tout numérique qui permet d’aller chercher son salarié jusqu’au fond de son pieu.
Et des managers tous bien formatés, qui ont bien assimilé le chapitre « la carotte et le bâton », mais qui avait piscine le jour du chapitre « qui veut voyager loin ménage sa monture ».
Le concept même d’entreprise est de plus en plus remis en cause « Total old school !! »

Cette conception « moderne » du travail ne l’est pas et nous transforme en tâcheron. Le tout enrobé d’un vocabulaire RH bien démagogique pour faire oublier la dégradation des conditions de travail.

Quant au dialogue social, aux représentants du personnel et aux syndicats, c’est bien connu que « ça ne sert à rien, tous des feignants si t’as un problème tu m’en parle mais va pas te syndiquer ça pourrait nuire à ta carrière. »

3 « J'aime »

Article tres interessant. En plus C vrais que la convention collective des SSII est pourrie et facilite les heures a outrance pas payées. Il faut par contre preciser que le droit du travail francais est quand meme assé protecteur par rapport au droit anglo saxon mais encore faut-il pouvoir lappliquer. Ce nest pas un secteur ou les syndicats sont tres développés et forts. Quasiment toue le monde est cadre et au forfait donc c encore mieux pour le crunch.

Doit on sacrifier sa vie privée, si courte …pour faire plaisir a son boss, qui lui ne voit que la rentabilité de sa boite. La vie est fragile, maladie, dépression, burn out, et après…
Alors bosser c’est bien, c’est valorisant parfois, mais la vie de chacun vaut plus que le sourire du patron.

1 « J'aime »

Le jeu vidéo, c’est loin du niveau des GAFA. Salaire en Europe en dessous des autres développeurs info (et on ne parle pas des artistes et gamedesigners moins bien payés), au Canada similaire; il n’y a qu’aux US que les salaires de dévs de JV sont un peu au dessus des autres développeurs info - sauf GAFA et finance.

Et je doute que beaucoup d’autres secteurs gardent les employés passés minuit, jusque 3h à 5h du matin.

Une différence avec les autres secteurs, c’est que les dév (progs, game designs, artistes etc.) veulent travailler sur un jeu, il y a beaucoup de fierté à sortir un beau résultat. Le crunch est en (petite) partie auto-imposé. Bon le budget temps (nombre de mois de dév) est bien imposé par la direction oui.

La plupart des jeux sont à peine rentables. Surtout dans les grosses usines genre Ubi Montréal, où un gros succès va compenser les pertes sur plusieurs autres jeux.
Par contre la quantité de pognon qui part dans le marketting :frowning: Souvent plus de 30%, parfois 50% du budget total.

Malheureusement, c’est le nerf de la guerre. Soit la justice l’imposera soit les boycott.

On ne peut pas de mandé à un Société internationale qui répond a des règles bien précises et qui sont toujours les mêmes : expansion, profit de faire preuve de bienveillance. Je précise que je ne suis pas contre les sociétés, elles ne sont qu’une méthodologie qu’il faut utiliser avec justesse au même titre qu’on peut utiliser un hachoir pour faire de bonnes ou mauvaises choses.

Boycotter un jeu qui inflige une grosse période de crunch à ses créateurs ne ferait qu’asséner le coup de grâce à ces salariés qui par passion et/ou par nécessité financière ont sciemment sacrifié des journées (et des nuits) entières de leur vie pour façonner « le jeu parfait ».

Merci pour cet article que j’aurais aimé un peu plus long.

Le montant du salaire est une chose mais il faut le ramener au coût de la vie sur place et surtout au nombre d’heures pasés à travailler chaque mois.
Entre quelqu’un qui touche 2000 € par mois pour 35h/semaine (5/7) et quelqu’un qui touche 10000€ par mois pour 100h/semaine (6/7 ou 7/7) et bien la différence n’est pas si énorme. La personne qui touche 10000€ n’est pas si bien payée que cela.

Redescend sur Terre …

Par rapport à quoi?

Aucun dév de JV ne touche 10k en France. Sur Paris, ça doit être vers 1,5k€ pour un débuttant, 2à 3k€ avec de l’expérience, et 4k€ pour un expert ou lead dév.

Cela ne m’étonne pas malheureusement.
Mais je parlais des salaires en général. Souvent les gens ne comparent que les salaires des autres avec le leur. Je voulais juste montrer que le salaire seul n’était pas une composante suffisante pour dire que quelqu’un était bien payé ou pas.