ÉTATS-UNIS
Bush désigné «homme de l’année» par «Time»
New York : de notre correspondant Jean-Louis Turlin
[20 décembre 2004]
George W. Bush a été choisi comme personnalité de l’année par Time qui publie une longue interview du président américain, dans laquelle celui-ci déclare espérer laisser le souvenir d’un défenseur de la liberté dans le monde. Un sondage publié dans le même numéro révèle néanmoins que la cote du président est restée au même niveau qu’avant sa réélection, le mois dernier : 49%. L’indice Gallup est un peu plus généreux, mais, avec 53%, le taux d’approbation de Bush est le plus bas de tous les présidents réélus. «Beaucoup d’Américains auraient très profondément souhaité qu’il ne le soit pas», a admis le directeur de la rédaction du magazine, Jim Kelly.
Mais la désignation de l’«homme de l’année» ne s’apparente pas à un concours de popularité et Time justifie ainsi sa sélection : «Pour avoir accentué les contours du débat jusqu’à ce que la couleur des choix finisse par dégouliner, pour avoir recadré la réalité de telle sorte qu’elle entre dans son dessein, pour avoir misé son destin et le nôtre sur sa foi dans le pouvoir du «leadership», George W. Bush est la personne de l’année 2004.»
Pas besoin de chercher entre les lignes une interprétation au deuxième degré. Time a récompensé en Bush les qualités d’un homme «qui ne change pas son fusil d’épaule (aux sens littéral et figuré), qui a refaçonné les règles de la politique». Mais le magazine écrit aussi que «l’homme, qui, en 2000, avait promis d’unir et non de diviser, semble maintenant prêt à laisser en héritage de son second mandat la mort du compromis». Car, dans l’interview à Time, Bush tire une leçon sans équivoque de sa réélection : «J’ai la volonté des gens derrière moi. (…) Je tendrai la main à quiconque partage nos objectifs.» Conclusion du magazine : «Quelque esprit de coopération qui survive au cours du second mandat devra peut-être se chercher parmi ses adversaires.»
Le commentaire portait sur la politique intérieure où va s’engager une grande bataille sur la réforme des retraites, dans laquelle les «adversaires» voient le démantèlement du système. Mais il ne faut pas s’attendre à un changement d’attitude fondamental en politique étrangère non plus puisque George W. Bush attribue sa réélection à «l’usage de l’influence américaine» dans le monde.
Désormais, celui qui a rejoint le «clan» des présidents nommés deux fois, après Truman, Johnson, Nixon, Reagan et Clinton (seul Franklin Roosevelt a exercé trois mandats et été trois fois «Personne de l’année»), travaille pour l’Histoire avec la conviction d’avoir raison envers et contre tous : «Je ne m’attends pas à ce que les historiens écrivent des choses aimables sur moi dans le court terme», dit-il dans l’interview à Time. Mais il prétend voir dans l’élection qui vient de se tenir en Afghanistan et celle qui se prépare en Irak la preuve qu’il est sur le bon chemin.