je bosse dans une usine sur les sujets « industrie du futur »
ça prendrait trop de temps et vous m’avez l’air tellement fermé que je ne vous convaincrais de toute façon pas
Concernant l’usine de demain vous avez tort.
C’est juste que je ne partage pas du tout votre vision, mais je pense qu’expliquer pourquoi est mieux que d’user de ce type d’argument (dont je pourrais user aussi, mais ce serait sans intérêt).
Concernant Macron c’est loin d’être de la méthode coué, même si bien sûr il y a aussi une importante part de communication et cela fait partie de son rôle. L’image de la France à l’international s’est carrément redressée comme terre d’attractivité pour les investissements étrangers, alors que les levées de fonds explosent et battent des records chaque année. Agnès Panier-Runacher entre autres a fait du super boulot, mais ce n’est bien sûr que mon avis.
Monter des startup qui crament du pognon, c’est très facile, obtenir des industries qui donneront du boulot à la grande masse en France, c’est une autre paire de manche.
On à déjà pu constater dans les années 2000 le peu de résultat des startup en France dans la mesure ou les conditions de notre pays ne se prêtent guère au développement de vraies industries.
Bref, les politiciens d’aujourd’hui ne font que répéter les mêmes erreurs que leurs prédécesseurs, d’abord par manque de connaissance de ces milieux et par la fascination naïve qu’ils ont de l’entrepreneuriat.
C’est ce qu’on appelle mettre la charrue avant les boeuf. La réalité, c’est que si tu ne peux pas produire en France, tu ne peux pas produire en France. Il faut d’abord remédier à ce problème avant tout.
Concernant l’usine de demain vous avez tort. Rien que la transition environnementale impose de plus en plus de revenir à des modes de production plus qualitatifs à tous les niveaux,
Sauf que la production automatisée est bien meilleure en terme de qualité que la manufacture à base d’humains. Un robot n’a pas d’état d’âmes, il n’arrive jamais bourré ni en mauvaise forme. Son bras ne tremble jamais. Et aucun humain n’arrive à son degré de précision et surtout, de régularité.
Si par transition environnementale vous entendez « normes qui changent tout le temps », donc production à modifier en permanence, c’est un des raisons pour laquelle notre pays est mort, parce que sa vision idéologique déconnectée des réalités économiques tends vers le manque d’efficience totale.
Car non, la transition environnementale n’implique pas de faire n’importe quoi. Et ceux qui pensent modifier les choses du jour au lendemain rêvent.
On ne peut pas produire de manière efficiente dans un pays incapable de la moindre planification doté d’une législation qui change au gré du vent. Les industriels français s’épuisent à suivre les changements incessants.
Nos dirigeants, que ce soit au niveau politique comme au niveau industriel n’ont pas appris la culture de l’automatisme. Ils sont incapables de penser dans le sens qu’il faut pour en faire un usage efficace.
Aujourd’hui effectivement la Chine a pleins d’usines standardisée, qu’ils rasent et remplacent lorsqu’il faut changer de production,
Sauf qu’une usine construite pour un produit représente la forme la plus efficiente de production. Et sa rentabilisation par cycle construction-exploitation-recyclage est également la vision la plus productive qui convient le mieux aux biens de très grande production.
le tout avec des ouvriers exploités.
Nous acceptons l’importation sans conditions venant de pays qui n’ont pas les mêmes normes sociales. Ajouté au taux de change défavorable pour notre industrie, il est impossible de lutter.
On va vers des usines reconfigurables, et je ne parle pas que de reconfigurer la programmation d’une machine, mais de former en temps réels les personnels pour s’adapter à des demandes de plus en plus volatiles …et de reconfigurer là encore le plus vite possible l’outil de production et la chaine d’approvisionnement. Et ça l’IA en est incapable pour un moment, alors que l’adaptabilité est apanage du genre humain.
Mon opinion est que c’est une erreur totale.
D’abord parce que l’humain n’est en réalité pas très souple. Il est même plutôt médiocre à ce jeu la. Quand on modifie en permanence une tâche, on obtient une belle quantité d’erreurs et des problèmes de qualité. Faites un peu de contrôle qualité, vous comprendrez que l’idéal, c’est juste de virer l’homme de l’usine.
Et je ne crois pas au fait de former les gens en permanence pour modifier la production, car cela produit une lassitude à long terme
Enfin, si vous avez raison sur le fait que l’homme est meilleur qu’un automatisme « basique » quand il s’agit de changer de tâche, il est en revanche très loin des capacités des automatismes plus avancés.
Pour ma part, je n’oppose pas les deux formes d’automatisme. Le futur sera fait d’automatisme efficients pour les grandes productions et d’automatismes plus souples pour les petites. A l’image de la cohabitation entre imprimantes et presses offset dans l’imprimerie en fonction des volumes.
Je vois le futur de l’automatisation reconfigurable comme totalement adaptable de manière logicielle. Mais la dessus, je n’en dirais pas plus.
L’usine est une ruche passionnante où on s’éclate sur pleins de projets et où l’intelligence collective permet des succès incroyables. C’est tout sauf le truc horrible que vous décrivez ^^
C’est une vision qu’on trouve souvent en haut de l’échelle, chez les cadres qui ont une bonne paye et un travail peu fatiguant. Beaucoup plus rarement en bas, dans les milieux ouvriers qui font les tâches les plus pénibles et qui ont le plus grand mal à boucler leur fin de mois. Et encore mois chez les sous traitants des sous traitants.
Pour cette raison, je pense que l’automatisation quasi totale, au moins pour tous les biens les plus utilisés, c’est le futur pour les conditions de vie du genre humain.
Il ne faut pas perdre de vue que le but, c’est de produire du bonheur humain, pas de produire pour produire.
Et si on veut parler d’environnement, il faut réaliser que cela passe par une production plus utile, mieux standardisée, plus durable, plus réparable et mieux pensée. Pas juste de l’obsolescence programmée et du green washing en mode « achetez la nouveauté (soit disant)plus verte en jetant tout vos biens ».
Une voiture, un avion, un jean, une pièce d’acier travaillée pour un client… on est de plus en plus dans du personnalisé en petite série, voire à l’unité, et cela va continuer justement pour éviter de produire du standard qui ne satisfait que rarement vraiment ses clients.
Une erreur courante est de se focaliser sur ce qu’on pense être le besoin du client en oubliant… qu’ils ne sont pas toujours prêts à en payer le prix. Par définition, un client veut toujours l’impossible, à un prix impossible, avec un délai intenable. Et il ne sera jamais content du résultat.
Mais surtout, il faut prendre plus de recul pour voir le problème d’une façon plus globale, c’est à dire au niveau de la planification d’une nation. Au contraire, je pense que les biens « standards » conviennent très bien à la majorité des usages quand il sont suffisamment bien pensés. Et c’est une des raisons du succès industriel de la Chine.
Produire des petites séries ou de l’unité est totalement inefficient en matière de cout. Et c’est encore plus vrai quand il faut mener de nombreux tests de validation du point de vue contrôle qualité.
Et puisque vous parlez d’écologie, un bien qui n’est pas standardisé est difficile à faire durer, ne fut ce que par l’absence de pièces de rechange.
La production à l’unité, c’est réservée à des niches, à des besoins particuliers ou aux plus riches qui ont les moyens de payer le surcoût important de ce type de production.
Mais surtout on a des unités de production résilientes capables de s’adapter à des changements de demandes clients majeurs et des crises multiples comme on en traverse de plus en plus. Et aujourd’hui c’est devenu la priorité, la covid en est encore un bel et tragique exemple. Parce qu’une usine ultra efficiente mais capable de ne faire qu’un seul produit, quand le marché change elle est morte. Alors que si l’usine est conçue pour être reconfigurable l’histoire n’a rien à voir…
Le local a de beaux jours devant lui, et la crise actuelle a permis de montrer justement à quel point c’était …vital.
En même temps, il ne faut pas perdre de vue qu’on ne peut pas produire localement, en petite série, avec des hommes de manière efficiente face à une grosse production mondiale automatisée dans des pays à bas cout.
Le meilleur exemple, c’est la production de masque. On a fustigé à juste titre la production délocalisée. Et incité des français à se lancer.
Le problème, c’est que malheur à ceux qui l’ont fait… car beaucoup se sont bien ramassés. Maintenant que la production chinoise de très gros volume est montée en volume, les masques français peinent à se vendre car ils sont trop chers.
Mais quelle vision négativiste !
Voilà ce que j’explique à mon équipe : « Vous n’avez jusqu’à preuve du contraire qu’une seule vie. Votre boulot est l’endroit où vous passez le plus de temps, alors il est de votre responsabilité de vous trouver un boulot qui vous plait, qui vous épanoui. Et si ce n’est pas le cas chez moi, partez, cherchez ce qui vous éclate …et réalisez-vous ! »
Il faut être réaliste, dans le contexte actuel, ce n’est possible uniquement que pour ceux qui sont jeunes ET qui font parti des profils relativement recherchés, donc qui ont eu la chance de pouvoir faire un bon cursus.
Celui qui est né dans une famille en bas de l’échelle, qui n’a pas pu faire de longues études parce que les conditions familiales ne s’y prêtaient pas, cette personne aura une marge de manœuvre très réduite en la matière, encore plus dans la situation actuelle.