Commentaires : Une voiture de course électrique datant de 1898 (!) va être mise aux enchères

“Désolé, je ne savais pas que votre réseau était si fragile et avait besoin de surveillance à ce point, nous au Québec nous avons du 60 hertz archi stable.”
Nous aussi on a du 50 Hz archi stable en pratique, hors situation exceptionnelle (même pendant la période “critique” de début 2018 où un producteur mentait sur sa production, la dérive de fréquence moyenne n’a été que de 0.01%). Parce que justement les producteurs adaptent en permanence la production pour suivre au plus près la demande.
Et c’est exactement pareil au Québec et partout dans le monde.
Tu ne peux avoir un réseau électrique stable que si tu adaptes en permanence la production à la demande.

C’est d’ailleurs en partie pour ça que les réseaux européens ont été interconnectés pour former un énorme réseau couvrant plus de 30 pays : un réseau plus vaste permet d’améliorer la précision statistique des prévisions de consommation, et donc de faciliter la mise en adéquation de la production et de la consommation. Si un pays avait un peu sous-évalué sa demande, ça sera souvent compensé par un autre ayant un peu sur-évalué, et au final, ça équilibre. Bon par contre ça induit plein d’autres problèmes pour gérer correctement la répartition de la charge sur l’ensemble du réseau, et ça expose à un risque de blackout monstrueux en cas d’avarie… mais il y a des sécurités, qui permettent de redécouper en sous-réseaux plus ou moins indépendants si nécessaires, et il y a aussi des interconnexions directes et indépendantes du réseau entre certaines points essentiels pour assurer la reprise si un blackout se produit (par exemple, une centrale nucléaire ne peut pas redémarrer seule en cas de blackout, il faut qu’elle soit couplée à un réseau 50 Hz, donc pour la plupart des centrales nucléaires, il y a une liaison directe vers une centrale hydraulique, qui peut redémarrer sur un réseau HS et va assurer le 50 Hz dessus, permettant ensuite de coupler la centrale nucléaire).

Mais c’est sans doute plus facile à gérer au Québec, parce que chez vous la part de l’hydraulique dans la production est beaucoup plus importante (plus de 95%, vs 12% en France et à peu près autant sur l’ensemble de l’eurogrid). Donc comme la production hydraulique est la plus facile à contrôler et celle qui peut le plus vite monter ou descendre en charge, avoir une part très importante de production hydraulique rend plus facile la mise en adéquation de la production et de la consommation.

“J’ai googlé ton texte mais je n’ai trouvé qu’une référence Africaine. Tu as mieux pour moi?”
Voilà l’article que j’ai cité : https://lemag.rte-et-vous.com/actualites/la-frequence-electrique-un-indicateur-dequilibre-du-reseau
Et une page de Swissgrid qui dit grosso modo la même chose : https://www.swissgrid.ch/fr/home/operation/regulation/grid-stability.html

C’est un site officiel de RTE, la filiale d’EDF qui gère le réseau de transport de l’électricité en France (EDF a été découpée pour l’ouverture à la concurrence : la maison mère EDF ne gère plus que la production et la commercialisation de l’électricité, en concurrence avec d’autres producteurs et d’autres vendeurs, sa filiale RTE est l’opérateur unique national pour le transport, c’est-à-dire le réseau haute tension, et sa filiale Enedis/ERDF gère la distribution, c’est-à-dire le réseau basse tension, sauf dans quelques villes où il y a un opérateur local à la place). EDF, c’est l’équivalent français d’Hydro-Québec, et RTE, c’est l’équivalent français d’Hydro-Québec TransÉnergie (EDF/RTE et Hydro-Québec sont d’ailleurs partenaires depuis de nombreuses années, et Hydro-Québec avait même failli racheter une petite moitié de RTE il y a quelques années).

Swissgrid est l’équivalent de RTE en Suisse.

Le site d’Hydro-Québec parle aussi de l’importance de l’adéquation entre production et demande, mais sans évoquer l’impact sur la fréquence : http://www.hydroquebec.com/comprendre/consommation/equilibre-offre-demande.html
Et là ils parlent un peu de comment le réseau est surveillé et piloté en temps réel pour assurer cette adéquation : http://www.hydroquebec.com/comprendre/transport/conduite-reseau.html

Tu vois, chez vous aussi le réseau a “besoin de surveillance à ce point” pour être archi-stable :wink: Gérer un réseau de transport et de distribution d’électricité, c’est loin d’être simple, à cause justement de ce besoin d’avoir toujours une égalité quasi parfaite entre demande et production. C’est pas comme un réseau routier, un réseau de données ou un réseau d’eau, où on peut sans problème tolérer des engorgements temporaires ou avoir des excédents de capacité.

Merci d’être entré dans le détail de cette problématique.
Malheureusement beaucoup de gens semblent ne pas comprendre ce qu’est un réseau électrique ni les impératifs structurels qui l’accompagnent en termes de fréquence et de tension (sans même parler de consommation)
A mesure que le temps avance, nous ajoutons à nos réseaux des facteurs d’instabilité (solaire et éolien pour la production, VE pour la consommation) qui vont à terme, je le crains, obliger les gestionnaires à des opérations de délestages réguliers en hiver, et donc à l’immobilisation massive des VE de telle ou telle région concernée.

Yep. La solution viendra sans doute des smart grids.

Des millions de voitures électriques connectées au réseau, ce sont des millions de batteries capables de moduler en une fraction de seconde la puissance qu’elles soutirent ou qu’elles injectent dans le réseau.

Mais y a du boulot pour y arriver, tant au niveau des infrastructures physiques que des logiciels pour gérer tout ça de façon intelligente.

Et bien sûr, aussi au niveau des mentalités, puisqu’il faudra que les gens acceptent que parfois, même en ayant laissé leur voiture branchée toute la nuit, elle ne soit pas à 100% de charge le matin… Ce qui en pratique n’est pas un problème énorme, puisque la plupart des gens n’ont pas besoin de toute leur autonomie sur la journée. Par contre, il faudra laisser la main à l’utilisateur pour réclamer une charge à 100% en cas de besoin, en contrepartie de quoi il payera plus cher son électricité durant la nuit… À l’inverse, ceux qui n’ont pas besoin d’une grande autonomie quotidienne devront aussi pouvoir le signaler, et on ne leur garantira par exemple que 20% de charge, en contrepartie d’un tarif plus bas…

Sur le réseau électrique français, la capacité de production est en fait déjà suffisante pour couvrir la consommation de dizaines de millions de VE parcourant 15 000 km par an en moyenne, mais à condition de faire tourner beaucoup plus les centrales thermiques à flamme (elles produisent actuellement moins d’un tiers de ce qu’elles pourraient produire, ce qui laisse une réserve de plus de 80 TWh annuels), donc à faire exploser les rejets de CO2. Ce qu’il manque, c’est “uniquement” la capacité à réguler la consommation/restitution des VE pour pouvoir exploiter pleinement la capacité de production, en chargeant pendant les creux de consommation et en utilisant les batteries pendant les pics. Il faudra sans doute aussi d’autres solutions de stockage pour lisser un peu entre l’été et l’hiver (la production d’hydrogène pourrait être une solution, mais le rendement n’est pas terrible…).